Dans le service nous suivons une patiente avec laquelle mes collèges et moi n’avons pas le même avis sur l’interprétation de son comportement (symptôme). Je voudrais avoir l’avis de quelqu’un qui aurait déjà eu ce même type de patiente, qui aurait été confronté à une situation similaire ou tout simplement qui pourrait me donner quelques éléments pour m’aider à répondre à ma question sur le diagnostic et donc la prise en charge.
La situation est la suivante :
Ma question concerne une patiente qui est suivit au cmp depuis longtemps. Elle a une histoire de vie sordide ; mère pmd ultra violente et abandonnique) a été élevé avec sa fratrie par le père qui était "un brave type".
Cette patiente a elle-même eu des violences sur son fils qui lui a été retiré très vite. Elle a rencontré un homme qui buvait +++ et l’a entraîné avec lui.
Alors là intervient mon dilemme : les collèges la disent mytho et moi je pense qu’elle est bien psychotique.
Elle invente des histoires de vie (son fils vient tous les dimanches elle va être grand-mère) (une fois une collègue a perdu son père, elle a dit qu’elle même à perdu des jumeaux cela avec moult détails sur le cercueil etc.) là dernièrement elle m’a appelé car son fils a perdu sa compagne et le bébé dans un accident de la route (pleurs +++ idées noires etc.). 15 j après elle me dit "Virginie mon fils à une nouvelle copine tout va bien je vais être grand-mère" sans plus aucune allusion à "l’ancien drame".
Alors moi je pense qu’elle est psychotique et délire à bloc.
Mais comment aborder ce que je pense être du délire avec elle ?
Elle a un bon lien avec moi et m’appelle dès que ça ne va pas au cmp. La dernière fois je l’ai fait hospitaliser elle m’a remerciée vivement car "elle se sentait trop seule". Et justement, je pense que c’est bien un délire qui comble son vide.
Bonjour
Votre question est très interressante car elle concerne plusieurs niveaux de reflexion.
Premièrement, les éléments que vous donnez ne permettent pas de déterminer si il s’agit d’une psychotique ou d’une mythomane. Dans les deux cas on peut trouver le même type de symptôme, la différence est dans la réalité psychique de la personne (ce que cela peut être dans sa tête). Sauf qu’on n’est pas dans sa tête et que même pour elle, ce n’est pas forcement simple de prendre conscience de cette réalité. C’est un peu pareil que la différence entre le refoulement, la dénégation et le dénie. Dans tous les cas l’objet n’atteint pas la conscience de la personne mais le processus par lequel il est annulé de la conscience n’est pas le même dans la psychose et la névrose. Mais tous diront que ça n’existe pas (l’objet refoule, denier ou signifier que par la dénégation).
Donc c’est au regard d’autre signe clinique que le diagnostic peut se faire. Ceci dit, la seule chose que ça change c’est le traitement psychothérapique ou médicamenteux. Or c’est le médecin qui va orienter la prescription. Si vous êtes en désaccord avec l’orientation actuelle du service, il faut en parler au médecin en lui demandant de vous expliquer qu’elle est à son avis le diagnostic. Normalement, le fait de vous l’expliquer va l’obliger à s’interroger et du coup peut-être à affiner son diagnostic et donc sa prise en charge.
Par contre, j’ai ressentie (peut-être à tort) qu’il y a derrière cette classification une autre préoccupation. En effet, il me semble que dans votre service (comme dans la plupart), le mot mythomane est habité d’une connotation négative (menteuse, raconte n’importe quoi, on ne peut pas se fier à elle……..) et que par contre, on se montre beaucoup plus tolérant (voir soignant) avec le mot délire. Pourtant dans les deux cas (psychose ou névrose) il s’agit d’une personne qui souffre et qui est malade (là je suis totalement d’accord avec papat62 : on ne reste pas à l’hôpital si on ne soufre pas). Ce qu’elle amène (mythomanie ou délire) ne sont que des symptômes qui nous parlent de sa souffrance. Or en tant qu’infirmier c’est de cette souffrance dont nous devons nous occuper et c’est cette parole que nous devons écouter. Vous avez donc raison de vouloir réhabiliter cette patiente aux yeux de vos collègues, mais c’est dommage qu’il faille passer par des étiquettes. De plus je crois que vous raison sur le fait que c’est entre autre de sa solitude dont elle parle. …mais pas seulement….( là par contre, je pense, contrairement à papat62 qu’un sentiment de vide ou de solitude peut être suffisamment source d’angoisse pour provoquer un délire)
Bien sûr je ne connais pas cette patiente et mon analyse n’est que l’interprétation de ce que vous rapportez d’elle, pourtant il y a des choses qui me choque suffisamment pour que je vous en fasse part. Qu’il s’agisse d’un délire ou d’une mythomane, l’important est qu’elle nous dit. Or elle nous parle de (je vous cite):
-son fils vient tous les dimanches.
- elle va être grand-mère.
-qu' elle même à perdu des jumeaux
-son fils a perdu sa compagne et le bébé dans un accident
-tout va bien je vais être grand mere
Je ne sais pas ce que vous en pensez mais moi je trouve que tous tourne autour de l’identité de mère.
En plus vous dites que son fils lui a été retiré (donc on ne la reconnait pas comme bonne mère) mais pour elle j’imagine que ce n’est pas seulement son fils qu’on lui a enlevé mais aussi sa place, son identité de mère.
De plus vous dites que sa mère était pmd, ultraviolente et abandonnique. Ce n’est pas facile avec ça de se construire une identité solide de mère. Bonjour les identifications négatives. Alors, lorsqu’on n’arrive pas à se construire comme mère (faute d’image identificatoire correcte) et qu’en plus l’autre (la société) vous dit que vous êtes une mauvaise mère, alors bonjour l’effondrement
En fait, qu’elle utilise ses rêves éveillés (mythomanie) ou délire, pour parler de sa souffrance de ne pas pouvoir être mère n’a que peu d’importance. Ce qui compte c’est ce qu’elle dit …..Et elle dit aussi que pour elle le seul qui peut la réhabilité dans cette image de mère, c’est son fils (en venant la voir tous les dimanche- donc reconnaissance de mère- et en la faisant grand-mère – la encore pour être grand –mère, il faut d’abord avoir été mère-).
Je pense donc que pour l’aider il faut travailler avec elle cette image de mère, et la revaloriser (Dolto disait aux enfants qui avaient souffert de représentation négative de leur mère « elle a fait ce qui était le mieux pour vous, contenu de ses possibilités du moment et de la situation ».
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je ne suis pas sur que le délire soit la pour combler un vide mais j'aurai tendance à dire qu'il est une tentative de "reconstruction". le fait est que si elle délire comme tu le penses, pour elle c'est vrai. c'est sa réalité. en même temps il est difficile de dire quelque chose car il y a peu d’éléments. mais c'est une personne qui semble avoir besoin de soins. car si elle a été hospitalisée en unité psy sans en partir c'est que son besoin de soins n'est pas une légende. il y a peu de gens qui resterait dans un hôpital public psy surtout avec le nombre de psychotiques qui s'y trouve. mais on ne sait pas non plus combien de temps à durer son hospit. mais l’intérêt n'est il pas pour le moment (car on ne sait pas non plus depuis combien de temps elle est connue du CMP) de pouvoir rester en relation avec elle, de pouvoir continuer à l'aider et de pouvoir lui prodiguer les soins dont elle semble avoir besoin. donc l’intérêt du diagnostic me semble dans ce cas la dans un premier temps accessoire. la chose la plus importante mais peut être me trompe je, n'est il pas la relation qui s'est crée et la personne avec qui un lien de confiance est né pour pouvoir continuer à l'aider..... mais je rejoindrai le titre du post: mythomanie ou délire est ce vraiment important....?